Au cœur du Fantastic Fest 2025, un événement incontournable pour les amateurs du genre fantastique et du cinéma d’horreur, se distingue une œuvre aussi déroutante que captivante : Les Cramps. Ce film, véritable œuvre d’époque, embrasse avec audace une esthétique délicieusement kitsch tout en plongeant dans un univers sanglant et extravagant. Signé par la réalisatrice Brooke H. Cellars, il s’affirme comme un cocktail détonnant mêlant horreur corporelle, satire sociale et une ambiance rétro qui rappelle le début des années 90, tout en s’enrichissant de références culturelles issues de la scène alternative. Cette production promet une expérience immersive sans équivalent, où le pus, le ridicule et la finesse psychologique se côtoient avec un éclat rare.
La trame s’articule autour d’Agnes Applewhite, une jeune femme coincée dans une époque qui oppresse tout autant qu’elle fascine. Tandis que ses douleurs menstruelles se manifestent sous la forme de créatures monstrueuses et métaphoriques, le film orchestre une flamboyante danse entre réalisme brutal et hyperbole grotesque. Plus qu’une simple histoire de monstres, il s’agit d’un portrait intime et déjanté, porté par un travail esthétique réalisé en 35mm qui confère une texture unique aux couleurs et aux ombres, renforçant son côté authentique et campy.
En cette édition du festival de films pour le public friand de culture alternative et d’œuvres audacieuses, Les Cramps figurent parmi les productions les plus remarquées, débordant de charme et de sang, et offrant une plongée jubilatoire dans le chaos hormonal et émotionnel de la femme au seuil de la maturité.
En bref :
- Les Cramps se démarque par son esthétique vintage en 35mm, rappelant les studios photo des années 90.
- Un mélange unique entre cinéma d’horreur body horror, mélodrame et comédie absurde.
- Une œuvre qui explore la douleur menstruelle à travers une métaphore monstrueuse, incarnée par un blob menaçant.
- La réalisatrice Brooke H. Cellars puise dans son expérience personnelle pour donner profondeur et authenticité.
- Présenté au Fantastic Fest, ce film cultive un style campy et flamboyant, séduisant les amateurs de films cultes.
- Expérience immersive au rendez-vous, portée par une mise en scène soignée et un univers visuel singulier.
Une esthétique rétro en 35mm : un choix audacieux au service du fantastique
Le recours au format pellicule 35mm pour Les Cramps n’est pas un simple effet de style. Dans un monde où le numérique domine, cette décision confère au film une profondeur et une texturation des couleurs particulièrement évocatrices d’une époque révolue. Le grain de la pellicule, les contrastes saisissants et la richesse des teintes participent à ancrer le spectateur dans un univers à la fois familier et étrangement intemporel.
Grâce à ce traitement, la réalisation de Brooke H. Cellars instaure une atmosphère qui rappelle le travail esthétique de Federico Fellini ou de Mario Bava, deux maîtres du cinéma d’époque dont le souvenir plane sur le film. La mise en scène s’apparente bien à une œuvre d’époque : les décors, costumes et coiffures s’inspirent des années 90, mais avec un accent théâtral qui accentue le côté camp et décalé.
Cette esthétique est au cœur de l’identité du film et joue un rôle majeur dans son impact. Par exemple :
- Les couleurs saturées et les éclairages dramatiques renforcent l’aspect grotesque et mélodramatique des séquences.
- Le cadre et la composition évoquent les photographies de famille des années 90, rendant le fantastique plus tangible.
- Le grain de la pellicule intensifie la texture visuelle des scènes sanglantes, où le réalisme se mêle à la stylisation exagérée.
Enfin, ce choix technique apporte une incontestable valeur ajoutée au film, qui sans elle aurait facilement glissé vers la parodie pure et simple. Au Fantastic Fest, qui célèbre l’essor du cinéma d’horreur sous toutes ses formes, cet équilibre entre hommage et innovation est salué comme un tour de force.
Une narration audacieuse mêlant horreur corporelle et comédie absurde
Les Cramps s’éloigne du film d’horreur classique par sa narration qui marie habilement le grotesque et l’humour grinçant. En effet, le scénario suit Agnes Applewhite, une jeune femme dont les douleurs menstruelles prennent la forme de monstres, incarnées par un blob rouge sang gluant, évoquant tour à tour une métaphore effrayante et un objet quasiment comique.
Ce mélange étrange entre horreur corporelle et comédie décalée s’exprime dans plusieurs aspects :
- Le traitement du thème menstruel : loin d’être un sujet tabou, il est ici examiné sans retenue, avec des épisodes où les douleurs d’Agnes se traduisent par des manifestations physiques fantastiques.
- Le style d’acteur volontairement théâtral : à la manière des pièces de drag queens, ce qui confère au film une allure irrévérencieuse et exagérée.
- Une écriture volontairement absurde : ponctuée de phrases mémorables comme « like a queef in the wind », qui placent le spectateur dans un registre décalé et foutraque.
Cette approche n’est pas sans rappeler les univers loufoques de John Waters, où le mélange des genres pousse souvent à la réflexion sur les normes sociales. En ce sens, le film s’inscrit parfaitement dans le festival qui met en lumière des œuvres hors normes, propices à la culture alternative et aux films cultes décalés.
Il faut noter que tout au long des 89 minutes, le film connaît un léger creux narratif au milieu, mais la montée en puissance jusqu’à l’apparition totale du blob-monstre maintient le public en haleine, culminant dans un dénouement à la fois absurde et totalement « bonkers ». Ce dernier acte invite à une réflexion sur les métaphores du corps et la peur de la féminité galopante.
Une œuvre sincère et engagée malgré son extravagance sanglante
Au-delà de l’aspect flamboyant et parfois outrancier, Les Cramps porte la marque d’une implication personnelle profonde de sa réalisatrice. Brooke H. Cellars confie s’être inspirée de ses propres luttes contre l’endométriose, apportant une dimension d’authenticité à ce film qui ne serait sinon qu’un simple délire graphique.
Cette sincérité transparaît dans la volonté de transformer un sujet médical douloureux en une expérience commune, cathartique et universelle. Le film traduit une forme de cri viscéral, un rejet des tabous entourant la santé féminine, tout en enveloppant ce propos dans une couche épaisse de camp et de gore.
Cette dualité entre le sérieux du fond et la légèreté du ton fonctionne comme une invitation à voir le cinéma d’horreur sous un autre angle, moins angoissant, mais tout aussi impactant. Parmi les caractéristiques qui témoignent de cet engagement :
- Un usage symbolique du sang et des douleurs, autant comme éléments narratifs qu’esthétiques.
- La représentation d’une femme en quête de liberté émotionnelle face à une famille étouffante et une société conservatrice.
- L’intégration d’une dimension fantasque qui permet de dédramatiser la souffrance à travers le rire et l’effroi.
Le Fantastic Fest est particulièrement propice à ce genre d’œuvres hybrides. Selon certaines analyses, comme celle publiée dans Simply Cinema, le film joue aussi une carte féministe, évoquant la puissance et les contradictions inhérentes à la condition féminine sous forme fantastique et humoristique.
Une expérience immersive au Fantastic Fest pour les amateurs de culture alternative
La programmation 2025 du Fantastic Fest confirme sa place de temple du cinéma de genre, mettant en lumière des productions aussi audacieuses que Les Cramps. Ce festival de films est une scène idéale pour les œuvres qui mixent horreur, excentricité et innovation visuelle.
Les spectateurs sont immergés dans un monde où l’étrange et le grotesque se conjuguent pour révéler des histoires chargées d’émotion et de provocation. Ce contexte favorise également la découverte d’œuvres hors normes, souvent à petit budget mais débordantes de créativité.
- Un public passionné et ouvert aux univers décalés.
- La présence de réalisateurs indépendants prêts à prendre des risques.
- Des discussions et rencontres permettant de comprendre la genèse et l’impact des films proposés.
- Des projections dans des lieux intimistes favorisant une proximité avec l’œuvre.
- Un soutien à la culture alternative et aux films cultes qui nourrissent la diversité du fantastique contemporain.
Cet environnement unique garantit que chaque projection devient une véritable immersion. La scénographie, l’accueil et l’ambiance générale contribuent à installer un climat propice à la dégustation visuelle et sensorielle. C’est dans ce cadre que Les Cramps s’impose comme l’un des moments forts de l’édition, un délice sanglant et mémorable.
Les influences culturelles et la place des Cramps dans le cinéma d’horreur contemporain
Les Cramps constitue une véritable passerelle entre plusieurs courants du cinéma d’horreur et du cinéma d’auteur. Son style rappellant John Waters, Mario Bava ou même Federico Fellini témoigne d’un regard cultivé et respectueux des racines tout en réinventant les codes.
Le film articule son récit autour de thématiques fortes, explorant :
- La monstruosité du corps féminin, notamment via la représentation hyperbolique des douleurs menstruelles.
- La satire sociale à travers le prisme d’une famille conservatrice et d’un environnement oppressant.
- La célébration de la différence et de la culture alternative, valorisant la marginalité et le spectacle outrancier.
Cette approche fait de Les Cramps un brûlot aussi divertissant que militant, un film qui invite le spectateur à réfléchir tout en étant happé par une ambiance visuelle et sonore immersive. Ce positionnement a d’ailleurs été largement salué dans plusieurs critiques spécialisées, notamment celles parues sur Starburst Magazine ou Beyond The Cinema Radamome, qui saluent l’audace et la singularité du projet.
À l’heure où le cinéma d’horreur tend à se normaliser, ce film revendique son excentricité et son ancrage dans un genre en constante évolution. Il incarne à la fois un hommage vibrant au cinéma d’époque et une célébration flamboyante de la modernité décalée.



